LETTRE AUX AEDES N° 4

Paris, le 26 février 2005

Bonjour, chers aèdes,

A une semaine de la lecture intégrale de l'Iliade, je fais un petit bilan des séances de lecture, qui se poursuivent aujourd'hui. J'ai l'impression, d'ores et déjà, que le groupe d'aèdes que j'avais réuni sous le nom homérique de Démodocos, pour dire l'Odyssée (en 1995-96), puis l'Iliade (2000-01), dans l'original et dans une traduction française rythmée (et les poèmes de Catulle, traduits par A. Markowicz), a tout à coup, en quelques semaines, à la fois révélé que ce qu'il faisait n'était pas aussi stupide que ça, et qu'il s'est enrichi de l'expérience des lecteurs venus à l'Iliade. On se réveille soudain désenclavés.. En fait, on savait que c'était possible, mais à chaque fois, c'était un comédien qui venait à nous pour une opération ponctuelle. Or, cette lecture intégrale de l'Iliade permet à un grand nombre de lire les "hexamètres", au contact d'autres aèdes, d'expérimenter la lecture à plusieurs, de se retrouver dans cette espèce d'énonciation commune où réside peut-être le mystère de l'épopée. Une énonciation qui englobe le public, parce que c'est la parole commune, les mots et les motifs que tout le monde connaît, les mots de la Muse, dans leur pas à pas rythmique.

Enfin, il est encore trop tôt pour parler du public. C'est l'inconnue principale. Mais peut-être qu'une clé de ce public, c'est de vouloir participer, de vouloir dire ou entendre (ce qui revient un peu au même), de vouloir entendre avec celui qui dit, de vouloir être avec les mots de celui qui dit (l'étymologie du nom d'Homère). Des amis viennent de Grèce pour dire quelques mots, en français ou en grec, dans la prononciation moderne ou restituée, peu importe (cette amitié peut se lire aussi dans l'étymologie d'Homeros).

Je tente de rentrer le plus de corrections possible sur les textes, ce qui explique que je tarde un peu. (Parfois je me résigne : on devrait laisser les variantes, ne pas rendre le texte homogène, ne pas effacer les répétitions, ne pas faire du beau style, laisser la liberté dans le choix de l'épithète). Les aèdes n'ont pas toujours travaillé sur "leur" passage, et je m'en excuse (qu'ils n'hésitent pas à me dire si j'ai oublié de donner un texte). Mais l'expérience est plus importante que tout pour cette lecture.
Bien à vous tous

Philippe


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